vendredi 30 janvier 2009

Big Brother, c'est toi

Redoutable ironie des temps modernes : Georges Orwell, que nous avons tous lu au collège je pense, prédisait dans son roman d'anticipation 1984 l'aliénation de tous par un Big Brother sachant tout, contrôlant tout, au regard duquel il n'est pas possible d'échapper.

La réalité dépasse la fiction : qui aurait cru qu'en 2008, c'est finalement chaque individu qui est un "Big Brother" pour lui-même ? C'est l'enseignement que nous permet de tirer le curieux journal le Tigre, dans un article retentissant, qui énonce publiquement tout ce qui peut être appris sur un individu, Marc L***, à partir d'internet, la plupart du temps à partir d'information que ce dernier a volontairement donné, lui-même, au fil des années.


Quelques extraits significatifs qui font froid dans le dos :

Bon annniversaire, Marc. Le 5 décembre 2008, tu fêteras tes vingt-neuf ans. Tu permets qu’on se tutoie, Marc ? Tu ne me connais pas, c’est vrai. Mais moi, je te connais très bien. C’est sur toi qu’est tombée la (mal)chance d’être le premier portrait Google du Tigre. Une rubrique toute simple : on prend un anonyme et on raconte sa vie grâce à toutes les traces qu’il a laissées, volontairement ou non sur Internet. Comment ça, un message se cache derrière l’idée de cette rubrique ? Évidemment : l’idée qu’on ne fait pas vraiment attention aux informations privées disponibles sur Internet, et que, une fois synthétisées, elles prennent soudain un relief inquiétant. Mais sache que j’ai plongé dans ta vie sans arrière-pensée : j’adore rencontrer des inconnus. Je préfère te prévenir : ce sera violemment impudique, à l’opposé de tout ce qu’on défend dans Le Tigre. Mais c’est pour la bonne cause ; et puis, après tout, c’est de ta faute : tu n’avais qu’à faire attention.

(...)

Alors, Marc. Belle gueule, les cheveux mi-longs, le visage fin et de grands yeux curieux. Je parle de la photo prise au Starbuck’s Café de Montréal, lors de ton voyage au Canada, avec Helena et Jose, le 5 août 2008. La soirée avait l’air sympa, comme d’ailleurs tout le week-end que vous avez passé à Vancouver.

(...) Le 21 août, c’est Steven qui t’a accompagné à l’aéroport. Retour en France, où t’attendait un mariage (Juliette et Dominique), puis, la semaine suivante, le baptême de ta nièce, Lola, la petite sœur de Luc (qui fait des têtes rigolotes avec ses grosses lunettes), à Libourne.

Revenons à toi. Tu es célibataire et hétérosexuel (Facebook). Au printemps 2008, tu as eu une histoire avec Claudia R***, qui travaille au Centre culturel franco-autrichien de Bordeaux (...)

Avant Claudia, tu étais avec Jennifer (ça a duré au moins deux ans), qui s’intéressait à l’art contemporain (vous avez visité ensemble Beaubourg puis tu l’as emmenée au concert de Madonna à Bercy). Elle a habité successivement Angers puis Metz, son chat s’appelle Lula, et, physiquement, elle a un peu le même genre que Claudia. À l’été 2006, vous êtes partis dans un camping à Pornic, dans une Golf blanche. La côte Atlantique, puis la Bretagne intérieure. Tu avais les cheveux courts, à l’époque, ça t’allait moins bien.

(...)

J’ai triché, une fois : pour avoir accès à ton profil Facebook (ce qui m’a bien aidé pour la suite), j’ai créé un faux profil et je t’ai proposé de devenir mon « ami ». Méfiant, tu n’as pas dit « oui », à la différence de Helena C*** dont j’ai pu admirer le « mur », là où tout le monde laisse des petits messages. Mais tu m’as répondu. En anglais, bizarrement : « Hi Who are you ? Regards Marc » Je m’apprêtais à inventer un gros mensonge, comme quoi j’étais fan de Vancouver et que j’avais beaucoup aimé tes photos de là-bas, mais au moment de te répondre, Facebook m’a prévenu : « Si vous envoyez un message à Marc L***, vous lui donnez la permission de voir votre liste d’amis, ainsi que vos informations de base, de travail et d’éducation pour un mois. » Je me suis dit que la réciproque était vraie, et je n’ai donc pas eu besoin de te répondre pour avoir accès aux informations de base.

(...)

Je pense à l’année 1998, il y a dix ans, quand tout le monde fantasmait déjà sur la puissance d’Internet. Le Marc L*** de l’époque, je n’aurais sans doute rien ou presque rien trouvé sur lui. Là, Marc, j’ai trouvé tout ce que je voulais sur toi.

Terrifiant, non ?


dimanche 25 janvier 2009

France : la résistance s'organise enfin ;-)

Le blog "En attendant" ne peut faire moins que de relayer les initiatives émergentes, notamment en vue des mouvements sociaux annoncés jeudi prochain.



Voici donc des nouvelles du Conseil national de la résistance :-) ainsi que de L'appel des appels, mouvements qui ont en commun de s'auto-animer via l'internet sans faire apparaitre la moindre étiquette syndicale et politique... mais est-ce vraiment une vertu ?

Peu importe, au fond.

Voici également un lien qui mène à l'appel la commémoration du 60e anniversaire du Programme du Conseil national de la Résistance du 15 mars 1944, signé de 13 grands résistants, et qui n'a rien perdu de son actualité, et auquel les tenants des appels précédents font référence.

Évidemment, sa référence claire à la remise en cause des acquis sociaux d'après guerre lui donne un caractère peu compatible avec les attentes des grands medias français soucieux de n'indisposer aucun puissant, et qui ne manquent jamais de faire passer tout mouvement social pour ringard à la base. Médias de nantis, forcément... Alors, ce que peuvent dire les Aubrac, Vernant, Hessel, à côté de la Star'Ac, quelle importance ? ...


mardi 20 janvier 2009

Changer d'ère


Clin d'œil à l'investiture présidentielle US de ce jour. J'ai entendu hier à la radio qu'Obama était "l'homme du gouffre". Difficile en effet dans l'histoire récente de trouver autant de lignes de rupture en présence en un seul individu : black à moitié africain, marié à une vraie afro-américaine, ayant éliminé au passage la candidate naturelle Hillary et arrivant dans une crise économique qui est en train de virer en crise de civilisation, et qui plus est à l'heure où les préocupations environnementales au sens large prennent le pas sur les autres considérations, y inclus aux Etats Unis.

Le grand Hegel aurait reconnu là l'inexorable marche de l'esprit dans l'Histoire, comme le jour où Napoléon - "l'âme du monde à cheval/Weltseele zu Pferde" - entrait dans Iena, le forçant à fuir la ville où il habitait.

Et nous voici, l'air de rien, en présence d'une nouvelle ère, à laquelle il va falloir nous habituer jusque dans notre quotidien le plus trivial et à notre corps défendant la plupart du temps.

Nouvelle ère dans les rapports économiques, sociaux et humains, passablement imprévisible, probablement erratique, au sein de laquelle les forces réactionnaires se mèlent étroitement aux forces progressistes, comme dans tous les tourbillons. Nous y voilà.

Et la question s'impose alors : à quoi s'accrocher pour ne pas être submergé ?

samedi 17 janvier 2009

Voeux 2009, année tristounette


On avait remarqué l'an dernier que les cartes de vœux institutionnelles avaient un air de famille. Même chose pour la livraison 2009, qui donne dans le minimalisme et la concision tout en mettant en valeur, souvent, le "9", comme si celui-ci marquait la fin d'un cycle, avec peu de mots voire aucun.

Voici quelques échantillons. La grande crise, les incertitudes du lendemain auraient-elles dissuadé de se souhaiter de bonnes choses, avec des vraies paroles, même pour un exercice convenu ?

mercredi 14 janvier 2009

Pour une guerre é-co-no-mi-que


On a pas idée de quoi étaient capables ces généraux de la première guerre mondiale. De quoi alimenter des montagnes et des siècles d'antimilitarisme !

Non contents d'avoir envoyé en 1914 au front des centaines de milliers de jeunes gens en pantalon rouge sans même un casque se faire tirer comme des lapins, ils exigeaient en plus que la guerre soit économique.

En témoigne cette affiche incroyable retrouvée au hasard de quelques recherches conduites à l'occasion du 90° anniversaire de la "Der des der".



dimanche 11 janvier 2009

La belle usine à gaz que voilà !


Information reçue ces temps-ci par les plus de 5 millions de fonctionnaires :


Merci, depuis 2005, les intéressés avaient probablement remarqué ce nouveau prélèvement obligatoire non compensé, qui a signifié donc à l'époque une perte sèche de revenu mensuel.

Remarquons au passage qu'il a fallu trois ans pour informer... A l'échelle des cathédrales, c'est peu, il est vrai.

Poursuivons l'exploration de l'envoi et découvrons ceci :



Tout ce système pour aboutir au final à 470 Euros de rente annuelle.... au maximum. et si tout va bien. Et à condition de partir en retraite à 65 ans. Super !

Imagine-t-on l'énergie, le temps de travail, l'argent investi dans la mise en place de cette usine à gaz, alors qu'il suffisait probablement de bonifier les systèmes de retraite existants ? Quels cerveaux enfiévrés de la haute fonction publique ont produit cette usine à gaz ? Au secours !

La France doit en effet être un pays immensément riche pour se permettre ce genre de gabegie, qui commence avec les frais d'édition et d'envoi de cette information ridicule et qui serait risible si elle n'engageait pas des fonds publics, en offrant au passage sur un plateau à tous les détracteurs du service public un bel argument pour stigmatiser l'inefficacité et la faible réactivité de l'administration publique... Bravo.